Dette, Immigration, Education, Emploi, autant de sujets fondamentaux qui sont bien installés dans la campagne présidentielle. Mais le thème tout aussi primordial de la Santé n’a certainement pas la place qu’il mérite, non ?
Certes, de ci de là, le sujet est abordé par bribes : un médecin qui interpelle un candidat sur la désertification médicale ; un politique qui évoque « la boîte de chimio donnée à ces malheureux cancéreux qui coûte plus chère que le salaire de l’infirmière qui les lui administre » ; un autre qui s’indigne du trafic de Cartes Vitales, etc… Bien sûr, me direz-vous, je n’ai pas assisté à tous les meetings, toutes les émissions télé, lu toutes les interviews dans les journaux, alors peut être fais-je erreur. Mais il n’empêche, on ne m’enlèvera pas de la tête que la Santé n’apparaît pas comme un sujet majeur de cette campagne. Et lorsque ce thème apparaît, il est présenté par un bout de la lorgnette : le prisme des dépenses, encore et toujours. Et là, tant qu’à faire, au lieu d’effleurer le sujet, il ferait bon creuser, tant le gâchis est grand : tous ces médicaments jetés car distribués en trop grand nombre aux malades, ces examens coûteux parfois inutiles, etc… Par ailleurs, outre les dépenses, peut être serait-il « utile » d’évoquer un service public qui se délite sous nos yeux : les heures d’attente aux urgences (« ah bah, c’est de la faute à tous ceux qui viennent là au lieu de consulter en ville, explique un candidat), le personnel soignant en burn-out, les consultations expédiées faute de temps, le temps d’attente trop long pour un IRM, etc…
« Ah oui, dit encore ce candidat, mais de quoi se plaint-on enfin… C’est gratuit ! » Certes, mais ne voit-il pas ce système public se déliter progressivement au profit du privé ? Cette médecine à deux vitesses, l’une pour les pauvres, l’autre pour les riches, qui si elle a toujours existé, s’impose à nous de plus en plus ? Par exemple, que penser des dépassements d’honoraires gentiment négociés avec le chirurgien avant l’opération de sa tumeur, ou le tarif de l’anesthésiste variant d’un lieu à l’autre ?
La Santé est donc la grande oubliée du débat présidentiel. Et pourtant, quand on sait que 15 millions de personnes en France sont des malades chroniques…Que un homme sur deux, une femme sur trois croisera le cancer sur son chemin de vie. Comment faire une impasse aussi flagrante sur un sujet aussi concernant ? Volonté politique ou tout simplement, n’est-ce que le reflet de cette campagne somme toute assez médiocre, question profondeur des débats ou vision d’une société revigorée? D’escarmouches en escarmouches, de mesurettes en mesurettes jetées à la figure des autres, nos candidats en oublieraient presque l’essentiel : que nous avons fondamentalement besoin de compétence, d’intelligence, pour relever nombre de défis. Soigner une population vieillissante, mais aussi des actifs frappés de plus en plus tôt par des maladies graves et chroniques, ne relève pas vraiment de l’anecdotique…
Anouchka