Valéria Milewski est biographe au centre hospitalier de Chartres. Elle propose -gratuitement- aux patients en soins palliatifs d’écrire le livre de leur vie. Soutenue dans cette démarche par l’équipe de l’hôpital, elle offre ainsi à ces grands malades un ultime projet et par là même, leur redonne le goût de vivre… jusqu’au bout. Le malade n’est plus un patient, mais un individu qui reprend toute son importance en transmettant son histoire et celle des siens.
« Lorsque tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens », dit un proverbe africain. Voilà ce que propose Valéria Milewski aux patients en soins palliatifs : renouer avec leurs racines en racontant l’histoire de leur vie. « En face de moi, je n’ai pas un malade mais un être humain. Une personne à qui l’on va proposer un nouveau projet, redonner le goût de la vie, tout en lui octroyant de l’importance en tant qu’individu », explique cette biographe hospitalière. Une respiration souvent gaie, drôle et pleine d’émotions, à portée gratuitement.
En deux ans, Valéria qui exerce ce joli et rare métier dans le service d’onco-hématologie du centre hospitalier de Chartres, a déjà écrit 24 histoires. Elle se définit elle-même comme une « passeuse de mots ». A tel point qu’elle respecte scrupuleusement le langage de la personne, sans autre touche de style. Elle écrit comme son interlocuteur parle. A chacun, elle consacre le temps nécessaire pour remonter le fil de leur chronologie. En huit à vingt séances de moins d’une heure, le patient va narrer l’histoire familiale, de ses grands parents à ses petits enfants, et conter les évènements importants qui ont jalonné les différents âges de sa vie. « Un monsieur qui pensait n’avoir rien à raconter, ne lâchait plus son livre. Il le trouvait passionnant ! Mais il était triste de l’avoir achevé ». Alors Valéria et l’équipe du service ont réfléchi ensemble au mot FIN, et ont décidé de laisser 30 pages blanches. Afin que de la main même du patient, l’histoire continue à s’écrire, jusqu’au bout…
Ce livre, Valéria en fait un objet unique : elle le fait mettre en page par un graphiste (car peuvent s’ajouter au texte, des photos, des lettres, des souvenirs), puis relier à la main. Trois exemplaires seront remis aux destinataires choisis par le patient. Mais s’ils en veulent en plus grand nombre, Valéria remet un CD et toutes ses notes.
Cette biographe, accompagnante de fin de vie, n’exerce pour l’heure qu’à Chartres. Mais elle commence tout doucement à former d’autres biographes. Triés sur le volet. Car il faut savoir écouter sans être intrusif -à aucun prix ne jouer les psy – , retranscrire fidèlement, être doté d’une grande bienveillance et savoir …se protéger aussi. Enfin, avoir une éthique sans faille. « Il est inscrit noir sur blanc que je ne peux pas être légataire universel ni recevoir de cadeaux », note-t-elle. D’ailleurs elle ne saurait qu’en faire car le plus beau des présents, c’est pour Valéria d’être accueillie avec un plaisir manifeste par ses narrateurs…
Anne-Laurence Fitère
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