J’ai décidé de changer d’oncologue | la maison du cancer

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Pour le patient, changer de médecin est un droit. Mais rompre l’alliance thérapeutique engagée sur le long terme avec son oncologue est loin d’être une décision facile à prendre. Dans certaines circonstances, oser cette rupture s’avère toutefois souhaitable. Pour quelles raisons décide t-on de changer de cancérologue? Comment procéder dans cette situation peu banale ? 

Demander un deuxième, voire un troisième avis après un diagnostic aussi choquant que l’annonce d’un cancer est une pratique fréquente. Mais lorsqu’une relation thérapeutique est déjà engagée, la décision de confier son dossier médical à un autre cancérologue est beaucoup plus rare. Parce qu’il s’agit d’une lourde décision, elle doit être mûrement réfléchie.

Pour lutter efficacement contre la maladie, patient et médecin doivent faire équipe et unir leurs forces. Parce qu’elle ne le ressentait plus ainsi, Cathy, malade depuis plusieurs années, a décidé de changer d’oncologue : « c’est une décision très difficile à prendre. Pendant des mois, on a mis sa vie entre les mains d’un cancérologue. Ce n’est pas rien ! De plus, quand la maladie s’installe sur la durée, on a ses repères à l’hôpital, et accepter de les perdre n’est pas si évident», confie-elle.

Oser se prendre en charge

Changer d’oncologue n’est pas simple. Il faut être certain d’avoir tout pesé dans la balance et avoir aussi, il faut le dire, le courage de s’affranchir de l’autorité médicale. « Beaucoup de gens ont peur de le faire. Ils craignent de se mettre leur médecin à dos et se disent : « si je le lâche et que plus tard, je me rends compte que je me suis trompé comment vais-je faire ? », explique le Dr Bassot, cancérologue dans l’Eure-et-Loir.

Pourtant, écouter sa voix intérieure et suivre son instinct en cas de doute est primordial pour le bon déroulement du protocole de soins : « c’est très important de se prendre en charge, de rester acteur de sa maladie», confirme Cathy.

Des limites du médecin à la crise de confiance

Quelles sont donc les circonstances qui amènent les patients à prendre une telle décision ? « On peut être amené à changer d’oncologue dans trois cas de figure, mais en cours de traitement, cela reste exceptionnel», rappelle le Dr Bassot. Première situation : lorsque le traitement n’est pas efficace. Les patients espèrent alors qu’un autre médecin aura un traitement plus prometteur à leur proposer. Le malade a perdu espoir et a besoin de reprendre confiance. Deuxième cas : le professionnel estime avoir atteint ses limites et ne sait plus comment gérer la maladie. « Dans certains cancers rares, nous pouvons nous sentir dépassés. Notre expertise n’est pas suffisante », souligne le Dr Bassot.  En dernier recours, il peut alors proposer au patient d’entrer dans des essais thérapeutiques. Enfin, et c’est le cas de figure le plus fréquent, on peut vouloir changer d’oncologue lorsque le rapport de confiance entre le médecin et le patient est mauvais ou n’existe plus. « Le médecin doit être capable de prendre en compte la psychologie du patient et toutes les dimensions de sa vie. Par ailleurs, l’information est capitale : si on cache des choses au patient au départ, il peut ensuite avoir un doute et remettre en question la confiance envers son médecin. Enfin, il s’agit de proposer un traitement et non de l’imposer. En dernier ressort, c’est le patient qui décide et qui accepte le protocole thérapeutique », poursuit le Dr Bassot.

Cathy sortait dévastée des consultations qu’elle avait avec son oncologue. Le discours pessimiste que ce médecin lui tenait ne l’aidait pas à reprendre des forces. Avec le temps, elle s’épuisait dans cette relation. Il a fallu d’une situation mal gérée par le médecin pour qu’elle se décide à changer de praticien. Un choix finalement bien accepté par l’oncologue car discuté en bonne intelligence. « Nous étions d’accord sur l’idée que j’avais besoin d’un autre  regard. Cela m’a donné un nouveau souffle dans cette lutte contre la maladie».

Pour Eloïse, c’est dès le départ que la relation n’a pas fonctionné : « je n’étais pas du tout à l’aise. Il n’y avait pas de climat de confiance. Je n’ai jamais été convaincue par le traitement. Je posais des questions mais cela ne lui plaisait pas. Au bout de 3 chimio, je n’en pouvais plus. Je n’avais pas été informée des effets secondaires, j’avais perdu 15 kg et j’étais très mal mais il ne s’en est même pas aperçu ! Un jour j’ai tenté plusieurs fois de le joindre pour avoir un rendez-vous. Il ne m’a jamais rappelée. J’ai donc décidé de changer d’oncologue. Je ne regrette pas du tout. Je suis suivie aujourd’hui par une femme très droite et très énergique. Mais je ressens encore un peu d’amertume par rapport au fait d’avoir accepté ces premiers traitements, avec toutes les conséquences que cela impliquait. Je me suis sentie forcée de suivre ces chimio et cela a été un traumatisme pour moi ».

Dans leur démarche, Cathy et Eloïse n’ont pas rencontré de difficultés administratives particulières. Comme lorsque le patient veut changer d’hôpital, changer d’oncologue nécessite une seule condition : récupérer son dossier médical.  (pour plus d’informations : accéder à son dossier médical, un droit)

 Nathalie Ferron

Pour toute question juridique ou administrative sur ce sujet, n’hésitez pas à contacter le CISS (Collectif Interassociatif Sur la Santé). Permanence téléphonique tous les après-midi à partir de 14 h au 01 53 62 40 30 ou au 0810 004 333 (N° Azur, prix d’une communication locale).