On dénombre 6000 nouveaux cas de cancers du foie en France chaque année. Comment dépister ceux-ci au plus tôt afin d’augmenter, comme pour tous les cancers, les chances de guérison ? Et qui est plus particulièrement concerné? Les réponses du Pr Catherine Buffet, chef du service hépato-gastro-entérologie de l’Hôpital Bicêtre à Paris.
LMC : quelle population présente aujourd’hui un risque de cancer du foie?
Dans 90% des cas, le cancer du foie, ou carcinome hépatocellulaire, se développe chez une personne souffrant de cirrhose. Cette maladie chronique peut être due à plusieurs facteurs. En premier lieu, l’alcoolisme, qui représente à lui seul plus de la moitié des cas de cirrhose, ensuite viennent les hépatites chronique B et C (l’hépatite C touche 1% de la population) ; Puis, désormais, de plus en plus fréquemment, les syndromes métaboliques associant obésité et diabète de type II. Une personne présentant un foie cirrhotique voit ses risques de développer un cancer du foie augmenter chaque année de 2% à 5%.
LMC : comment dépiste-t-on ce cancer ?
Le plus souvent, le cancer du foie ne présente pas de symptôme au début. Lorsqu’il devient symptomatique, une ascite (présence de liquide dans la cavité abdominale), un ictère (jaunisse) ou encéphalopathie, ou une hypertension dans la veine porte avec une hémorragie digestive peuvent apparaître. La tumeur est alors déjà à un stade avancé. C’est pourquoi, il est très important de proposer aux patients cirrhotiques, deux fois par an, une échographie abdominale. Cet examen indolore, peu coûteux, remboursé et sans risque permet de détecter les carcinomes hépatocellulaires à un stade précoce où il est possible de les traiter.
LMC : qui prescrit l’échographie?
C’est le médecin traitant ou l’hépatologue qui prescrit cette échographie semestrielle. A l’heure actuelle, les médecins généralistes pensent plus systématiquement au dépistage colorectal, à la mammographie pour le cancer du sein ou au frottis pour le cancer du col de l’utérus. Un autre frein au dépistage réside aussi dans la réticence à parler de cirrhose qui est liée à l’alcoolisme et/ou à l’hépatite C ou B (les deux étant associés dans 10% des cas). Mais l’échographie pour les patients souffrant de cirrhose est aussi importante que les dépistages désormais passés dans les mœurs. Car la cirrhrose ne présente pas ou peu de symptômes, elle est alors dite « compensée »: à l’examen, le foie peut être un peu volumineux et dur. Mais petit à petit, on peut voir apparaître des angiomes, des ongles blancs, puis, dans les cas les plus graves un ictère ou une rupture des varices œsophagiennes. Il est donc important d’encourager le dialogue médecin /patient afin d’agir avant l’apparition de ces signes qui montrent qu’un processus délétère est en marche. Suivant le cas, quatre types de traitements peuvent alors être mis en place : la transplantation lorsque le foie ne fonctionne plus correctement, l’ablation partielle qui permet de retirer la tumeur lorsque le fonctionnement de l’organe n’est, par ailleurs, pas altéré, la chimiothérapie, et la destruction tumorale percutanée (destruction de la tumeur à travers la peau à l’aide d’une sonde délivrant un courant électrique dans la tumeur) pour les cancers de petite taille.
Propos recueillis par Isabelle Palacin